Paul
Les murs ont chuchoté
entre eux d’abord
puis vers nous … de plus en plus fort
Frida
un auteur a frappé à ma porte
tout doucement je l’ai laissé entrer
à mon oreille il a murmuré
Laura
il a murmuré des mots étranges
des mots étrangers
ponctués de violence et de légèreté
Louis
je n’ai rien fait je n’ai rien dit
je lui ai donné à boire
et à manger
Antonio
les cris étouffés
les murmures étoffés
une porte a claqué
Robert
pas de fenêtres,
que des barreaux
le ciel a disparu
Rosa L
pas de mots
que des cris
des gouttes d’eau, du silence
Robert
pas de souvenirs un seul bruit
pas de musique, juste une fugue
pas de temps, que la pluie
Louis
les murs ont chuchoté entre eux d’abord
puis de plus en plus fort
qu’avaient-il à transmettre?
Guillaume
des cris son parvenus étouffés
des murmures plus étoffés
est-ce qu’une porte a claqué ?
Antonio
Je me suis recueilli
le silence a jailli
me suis-je endormi ?
Robert
au Mémorial de la Shoah des japonais…
ai pensé à Hiroshima
les rimes font-elles toujours sens ?
Jean n’a pas bronché
il a levé les yeux au ciel
quel compte avait-il à régler ? avec qui ?
Jean
sur la place postdamer a trébuché
les murs en miroir ont-ils troublé sa vue ?
Trompé son équilibre ?
Paul
Des boîtes des cubes des reflets
des éboulis des éclatements
que s’est-il passé ?
Else
des surfaces une géométrie dans l’espace
se découpe volontaire
plans d’architectes berlinois
Johanna
topographie des terreurs
murs ébranlé ébranlement
mur éboulé éboulement
Robert
un mur impassible de gris
un mur impossible à penser
pourquoi faire semblant de l’oublier ?
Robert
ich bin judde
je suis juif et tchèque
ah oui et tu es fier ?
Robert
-Rrose Sélavy, ça te dit quelque chose ?
-Oui je suis surréaliste corps et biens
-et fermer ta gueule tu sais faire ?
Max
-Juifs résistant forte tête ?
-on vous sortira de Berlin
pourquoi tant de haine
Wilhem
un obus dans la tête un bandage pas de bande-son
un obus de 18 ou du 17 octobre
quelle année était-ce ?
Blaise
tu renais de tes cendres
qu’il est long ce voyage
es-tu sûr de ne pas trembler ?
Paul
la terre est bleue comme une orange
le ciel gris couleur terre que l’on bouffe
et la couleur de tes seins Elsa ?
Elsa au miroir
la courbe des yeux fait le tour de mon cœur
est-il un seul point au monde où tu n’es pas ?
check point Elsa ?
Jean
ne te retourne pas
ne parle à personne
retire ton étoile jaune
Louis
concentre-toi
cesse la poésie
sois réaliste
Antonio
peint la même chose mais sans couleur
n’oublie pas le mouvement
n’écoute pas les chiens aboyer
Robert
tu vois ces squelettes ?
ne t’attarde pas
ne perds pas ton sang-froid
Jean
ne perds pas ton temps à regarder le soleil voilé
absorbe-toi sur ton intérieur
fais en la promesse
Jean
ne marche pas dans le sang
ne laisse aucune trace
efface tes empreintes négatives
n’obéis pas aux ombres
Louis
Le vent murmure dans les saules
tu as déjà trop entendu sur les brücke on the bridge
la bouée t’empêchera de sombrer
Virginia
laisse-toi porter par les flots
tu te souviens ?
une architecture inventive
Frida
sous les ponts de Berlin ils sont là
ils t’attendent mais tu ne les vois pas
tu ne sais qu’imaginer
Sofia
évite la névrose, passe à côté ne t’arrête pas
ses griffes sont acérées
les désaxés t’entraînent à ta perte tu les crains tu les écartes
passez votre chemin Misfits
Else
Les voix qui tressautent les voix éraillées
les voix qui sonnent faux
éloigne-toi de ces voix du passé
Johanna
tu as le droit de te protéger
tu as le droit de choisir
le droit de te taire
Paul V
le vent se lève il faut tenter de vivre
tu t’es toujours demandé si tu vivais dans la réalité ou dans la fiction
tu sais bien qu’il n’y a pas de réponse à ta question
Rosa L
j’étais
je suis
je serai
Paul
Tandis que tu reposes paisible
tandis que je te cherche
les saisons continuent leur mélopée
Hubert
loin de Berlin la ville coupée en deux
loin de la Spree coupante
loin de toute humanité, écouter les murmures de la nature
Laura R
quelqu’un s’est penché
quelqu’un a jeté une pierre dans le canal
quelqu’un s’est jeté du balcon
Louis
moi qui ai dû apprendre des pierres
moi qui me bats pour ajouter une pierre au silence
j’ai observé les cygnes glisser
Paul
J’aimerais tant construire
j’aimerais tant réinventer le passé
j’aimerais tant que cela ne fut pas
Frida
sais-tu que la poésie s’écrit au présent
sais-tu que l’on peut détruire les murs ?
sais-tu que pierre à pierre que brique-à-brique, que côte à côte,
que main dans la main, que ensemble… le papier est déchiré à cet endroit
Paul
lorsque tombent les plantes grimpantes
lorsque s’enroulent les capucines autour des poteaux déglingues
lorsque chuchotent les feuilles
laisse voler les soupirs au lointain
Rosa
pourtant tu me l’avais prédit
pourtant je ne t’avais pas cru
pourtant tu avais raison
c’était écrit sur les murs
Antonio
ne plaignez pas ceux qui se taisent
ne plaignez pas ceux qui partent
ne plaignez pas ceux qui se murent de silence
Max
n’hésitez pas à vous rendre à l’évidence
n’hésitez pas à refaire le trajet inverse
n’hésitez pas à vous laisser éblouir par les reflets de fer
Louis
Tandis que le soleil s’étiole sur les branches
tandis que les voix se heurtent aux murs des prisons
tandis que j’écris, d’autres vivants sortent de l’ombre
Laura
quand tu crois que tout est fini
quand tu crois que tout est pourri
regarde autour de toi
Robert
faire le mur c’est se carapater
se faire la belle
c’est oublier les murs et leur carcasse muette
Laura
j’ai murmuré le soir sans m’en apercevoir
sans m’en apercevoir j’ai consenti l’oubli
j’ai consenti l’oubli afin que rien de ce que nous avons vécu ne revienne
Louis
c’était comme un appel comme un cri un chuchotement
doucement ils se sont tus
délicatement je les ai fait taire
Paul
sans eux il n’est point de salut
sans elle rien n’était possible
cela aurait pu ne jamais se terminer
Louis
sous les tilleuls murmurent les ailes pâles
sous les tilleuls il est un no man’s land
sous les tilleuls un homme est prêt à partir
PASC