Quelle fraîcheur !

Paris ,1927.

« Quelle rigolade ! Bouleversements, changements, nouveautés, inaugurations et découvertes…C’était vraiment l’année ! L’année à vivre absolument ! Je ne regrette rien. Je me félicite tous les jours d’être partie et d’avoir décidé de vivre l’année 1927 pleinement !

C’était une urgence ! Je ne pouvais pas faire autrement … je n’en pouvais plus de cet appartement petit bourgeois et de cette mentalité étriquée… les bonnes manières, les sourires à la bonne et à belle maman, le costume de Léon à porter à la blanchisseuse et les patins pour ne pas rayer le parquet …Excusez-moi mais salut, au-revoir, tchao tchao … !!!…

Et puis merde, il y a déjà eu la guerre, les années noires après-guerre où chacun essayait mesquinement de retrouver sa place et quelques malheureux petits sous …Stop ! STOP !

Et puis toutes ces avancées technologiques, Lindbergh qui traverse l’atlantique, ces bouleversements dans Paris avec le boulevard Haussmann récemment inauguré…

J’ai adoré ! J’adore ! Je vis !

J’ai fait couper mes cheveux, j’ai bu du champagne. J’ai servi de modèle, de muse … Faut bien vivre !! J’étais comme un poisson dans l’eau dans ce milieu artistique. Il y tant de choses à faire et à construire ! Et tant d’autres à rejeter et à bannir ! C’est un nouveau monde qui commence et qui pousse l’autre … JE VAIS TE LES SECOUER, TU PEUX ME CROIRE !!! « 

« Elle est partie comme ça …Pschitt …plus personne…aucune explication, elle nous a tous laissés là… volatilisée … on n’a rien compris ! Elle ne manquait pourtant de rien : une bonne, un appartement correct, un mari sérieux et COMPTABLE en plus, une belle maman souriante … On a cherché, les hôpitaux d’abord bien sur … on a attendu, espéré, abandonné. Et puis un jour, on a reçu une missive : ‘Ne vous inquiétez pas ! Je vais bien !’

C’était court. Ça ressemblait à un pied de nez. Elle se moquait. Et en même temps, c’était une bouffée d’air frais pour nous, confinés dans notre trois pièces … »

 » Léon ! Mon petit Léon !! Que je suis heureuse de te revoir ! Ça fait un an ! déjà !!! Comme le temps passe vite ! Je t’ai ramené un costume, un costume de golf en Prince de Galles avec une casquette assortie. Et vous Belle Maman, une robe Charleston ! Ça vous ira à ravir ! Nous allons de ce pas au cinéma ! Il y a une grande soirée pour le lancement d’un nouveau film Américain qui est parait-il extraordinaire ‘Cabaret’. Ça va te plaire mon petit Léon. C’est une histoire de détectives et de gangsters avec de la musique et de la danse dans un cabaret … pour vous Belle Maman ! »

 » Mon dieu ! Elle est devenue folle ! Regardez-la, avec ses cheveux courts … Elle ne fume pas, ouf ! On a échappé à cela ! elle est vivante, c’est une chance … elle a l’air en forme, elle a bien mangé apparemment.

Mais elle a fait la folle, ça c’est sûr ! Pendant presqu’un an …Avec quoi a-t-elle vécu ? Je n’ose l’imaginer…

Et là voilà de retour. Pas un mot d’excuse, de regret, d’explication…une TORNADE !

Elle ouvre la porte- un coup de vent – comme hier ! Comme si tout était normal … surgie, on ne sait d’où … chaleureuse et pétillante, sûre d’être accueillie…

QUELLE FRAICHEUR !! »

Sylvaine Dockerty

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