Escapade vers le passé

Ce frisson ce frissonnement ce picotement s’installant entre veille et sommeil cet ensoleillement cette acuité du regard dérangeant comme un corps se déplaçant malgré les encombres du temps et du vent saccadant les branches mortes d’une généalogie désuète et pourtant encombrante d’actes refoulées de dénis endeuillés d’ennuis transitoires et intransigeants

Et puis cette respiration brisée flouée ce manque d’air troublant apeuré appelant le néant imaginant la fuite au plus loin du passé cassant les pierres et les briques imbriquées de névroses et d’osmose ce geste ce mouvement brisé cassé crié implorant

Une danse pensée une saccade une cascade un corps cassant et se reconstruisant sur le rythme saccadé d’une folia baroque et folle un corps plié pliant sous le poids des branches mortes butant sur ses propres racines n’arrivant plus à se sevrer de sa sève devenant de plus en plus rare ses saveurs empourprées de suavité barbare de décade en décade d’espèces d’espace inconnus à nouveau réappropriés à la faveur d’un pas chassé d’une myriade de gestes décalés saccadés cassés d’une marche forcée

Le sommeil

Entre veille et sommeil à cette heure incertaine où les loups et les lions vont boire où les arbres manchots battent des nageoires cette heure qui tente d’exister qui se fraie un chemin à coups de machette dans une jungle d’ombres mouvantes plus mouvantes et dérangeantes que poissons en bas fonds ce chemin escapade de pierres branlantes inassouvies voraces voulant dévorer quiconque s’aventure

Ce passé déplié déployé dans un désert sombre accumulé de noms et de vies dérivées de rêves chavirés de fantasmes broyés

La respiration

Elle se fait rare et lente

l’air y est saupoudré le passé efface un présent dépassé

respiration nocturne effrayée de blessures non pansées la respiration s’affole prend ses ailes se tait puis repart apaisée

les tempos sont de braise

les poumons affaissés

englués de passé

la respiration se fait belle

elle a ses embrasées

ses embrasées d’espace d’air libre de soleil de pureté

elle a ses zones libres

ces espaces de pensée ces espaces pensés

l’air n’y est plus rare

il est permis de souffler de se laisser aller

Une cascade

Une cascade folle de photos encadrées de mouvements arrêtés

d’instants volés sur un parcours passé dépassé

velouté de brume et de chagrins larvés plein de larmes embrumé

pourquoi faudrait-il se réjouir de ce passé passé ?

A-t-il cette importance qu’on lui prête lorsque les yeux se ferment et qu’arrivent en cascades des visages esseulés ?

Quelle est cette cascade de mots volés envolés enrubannés de sable et de poussière vaguement époussetée ?

Était-il bon y être ?

Fallait-il y rester ? 

Qu’est-on  en droit d’imaginer ?

Allons-nous nous nous tromper ?

À quoi bon cascader ?

Cascader la vertu

Cascader les années

Cascader les mots les phrases les livres les rires et les larmes les oublis la mémoire le cœur et ses blessures

Cascader le passé

Et je m’endors ainsi chaque nuit chaque soir remuant le passé sans l’avoir voulu

sans l’avoir convoqué

Il s’installe dans ma vie et prend toute la place il marche dans ma tête à grands pas en danse effrénée

me pénètre en cascades frappe frappe à mes tempes

Se risque s’impose se frotte à mes tympans

m’oblige à une folia folle qui me baroque et me craque

Mon passé me submerge je ploie je me noie et au matin chaque fois ressuscite riche de nouvelles images de nouveaux visages

resurgis du passé

PASC

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