Les cinémas

 

Les cinémas : lieux de culture, de loisirs, de rencontres, de découvertes, d’émotions, de pleurs étouffés, de rires tonitruants, de gestes déplacés, de caresses amoureuses ; endroits sombres de promiscuité où règnent les soupirs, les remugles ou un silence bienfaisant.

Cinémas de Chine aux box séparés pour couples constitués ; de Thaïlande où l’on se lève en début de séance pour rendre hommage à la famille royale qui vous domine sur l’écran ; cinéma du Yémen aux films censurés sans queue ni tête où seuls les hommes pénètrent laissant leur kalachnikov ou leur jambia en dépôt à l’entrée, qui fument et emplissent la salle d’un nuage opaque et odorant, qui s’interpellent, font les pitres devant l’écran et sont rappelés à l’ordre par un surveillant général armé d’une badine

Cinémas des grands complexes américains aux fortes odeurs de popcorn où les rangées de devant sont réservées aux obèses-Culbuto, lumières fortes et moquette épaisse, ville dans la ville

Cinéma Alhambra du temps jadis, aux premiers sons dolby stéréo où les galops des chevaux semblent venir sur nous de l’arrière de la salle, visage ensanglanté de Peter O ‘Toole

Cinémas de comédie musicale sud-américaine où les spectateurs dansent sur leur fauteuil au rythme du tango ou de la samba

Cinémas d’adolescence où la parenthèse de proximité dans le noir décidera par les premiers gestes des liens à venir

Cinéma de la Maison de la culture au Havre, lieux d’expérimentation pour intellectuels avertis embarqués pour vingt quatre heures de projection continue rivés à Rivette

Cinémas de plein air drive car d’Arizona pour western en plein désert, moment d’immersion dans la civilisation de l’individualisme

Cinémas du fespaco d’Afrique avec vieux projecteur monté sur groupe électrogène ; ambiance colorée dans la salle, rires bruyants et réactions entendues des locaux fortement exprimées ; le spectacle est dans la salle

Cinéma ambulant au drap tendu dans les villages au son crachotant, attraction collective pour tous avec enfants excités assis à même les terres rouges

Cinémas d’après-midi pour retraités aux cheveux blancs, dispersés dans une salle trop grande

Cinémas pour opération Lycéens au cinéma, cauchemar des enseignants, salle en délire, mais découverte intéressante

Cinémas aux bruits intempestifs ou au silence profond, aux yeux rougis quand la lumière se rallume, au sentiment d’une commune émotion partagée, cocon où une tranche de vie a eu lieu

Josette Emo

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