J’escapade

Saisi d’une curiosité sans préjuger de découvertes vraiment enthousiasmantes et cependant attendues avec l’intuition d’un changement profond de son être au retour partir sans prévenir personne pour une courte exploration

Entrer dans un univers de formes et de couleurs mais aussi de matières à la fois familier et inquiétant ignoré du peintre lui-même Lire la suite

Espèces d’escapades

avec les lettres du mot escapade...

Ça passe, ça casse ! Cascade d’escapades, espaces dépassés ; accède à sa case à pas saccadés ; espèce passée, dépassée ; ça décape ! Pas de casse, cas d’espèce !

Dominique Pierre

ça décape, ça décade

pas de cascade, espèce dépassée

espace dépecé

papa passa, céda pas à pas

décapé,

pas d’escapade

RMQ

Pas espacés

Espaces saccadés

Caps escapes

Des passés dépassés

Des passés dépecés

Des pas saccadés

Cascades de passades

Décades d’espaces

De cap en cap

Ces pas espacés

D’espace à espace

Ce passé dépassé

Cède pas à pas

D’espace à espace

D’espèce à espèce

De passé à passé

Ça passe

Clarysse

Pas de saccade

Ça casse

 

Pas d’espèce

Ça pèse

 

Pas de cascade

Ça dépasse

 

Pas de pape

Ça désape

 

Des cèpes ! Des espaces !

Ça, ça décape !

Danielle Fayet

Toupet rouge

Saint-Vaast-la-Hougue, le 27 septembre 1936

Ma chérie,

Voilà terminé mon séjour chez Anselme, hôte chaleureux et ami dévoué, qui m’a bien soutenu dans les moments difficiles que je viens de traverser.

J’ai découvert un Cotentin plutôt rude, fait de paysages difficiles à approcher, hérissant — à juste titre ! — des défenses contre les super-prédateurs que nous sommes…

Je quitte donc demain Saint-Vaast-la-Hougue pour Montreuil-Bellay chez mon vieux copain angevin où m’attend une caisse de Chenin. Cela signifie que je ne rentre pas tout de suite à Rouen et il faut que je te raconte tout de suite l’aventure (est-ce le bon terme ?) que j’ai traversée dans ces marais du Bessin. Lire la suite

Franchir la frontière

Elle est assise à sa table d’écriture. Sur la chaise de jardin, elle a posé un coussin couleur safran pour en améliorer le confort.

Elle a hésité, puis a fini par choisir le papier : blanc, format 21×29,7 et un stylo à bille noir. Elle a fermé et repoussé son ordinateur. Elle tourne son stylo entre ses doigts. Elle s’étire, se lève, va chercher un verre d’eau. Elle déplace sa chaise pour présenter son visage à la chaleur du soleil matinal qui entre par la fenêtre. Elle ferme les yeux, attentive aux bruits : le ronronnement paisible de la machine à laver, le vent qui secoue le store. Elle ouvre les yeux, regarde la feuille vierge devant elle. Où trouver les mots pour décrire l’indicible ? Des idées, des lambeaux de phrases, des suites de mots peinent à émerger. La tentation est forte de renoncer… Lire la suite

Maintenant

Maintenant je trempe un carré de chocolat dans mon café brûlant et une bombe est tombée sur l’immeuble au bout de la rue et le petit Mohamed sort de sa maison son cartable sur le dos et un chien aboie après un cycliste qui zigzague de surprise et un homme pleure devant l’immeuble en feu et une femme rit en regardant son bébé et du sang coule sur le visage d’un soldat et lui il regarde médusé à la télévision les images du drone survolant les ruines de Marioupol et un hélicoptère jaune traverse le ciel bleu et ma voisine rature ce qu’elle vient d’écrire et des colombes de faïence se tournent le dos sur le banc du jardin et un téléphone portable sonne et …

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Horizons, songes et mensonges…

 

Au premier plan, une longue planche posée sur les vaguelettes figées d’un sable blond parsemé de cailloux. Une dalle de béton d’un bâtiment inachevé contre une maison de bois entourée d’objets éparpillés, abandonnés là en désordre : un poteau renversé, un tuyau d’arrosage déroulé, un grand pot de fleur en terre posé à l’envers sur un piquet. Une table en tube et plateau de bois avec son banc soudé, peut-être un banc d’écolier. Sur la table est posé un objet qui ressemble à une paire de jumelles. À droite de la table, un sapin projette une ombre noire sur un rouleau de fil de fer rouillé. Derrière le bâtiment, en partie dissimulé, un gros pick-up rouge métallisé. Plus loin au second plan, le terrain s’élève peu à peu, planté de buissons rabougris, jusqu’à l’horizon blanc de poussière et de chaleur, hérissé de poteaux électriques, peut-être une ligne de chemin de fer.

La lumière est blanche, aveuglante, les ombres sont courtes. Il est midi.

Longtemps tu as fixé au loin la ligne de rencontre entre la mer et le ciel, guettant le surgissement d’un vaisseau qui entrera au port, chargé de trésors, attendant chaque matin avec soulagement la lente émergence du soleil, parfois hors de l’océan, parfois derrière le trait déchiqueté des montagnes.

D’où vient ce navire ? Et le soleil, qu’a-t-il éclairé avant de plonger dans la sombre vallée où tu es né ? De riches contrées de contes et de légendes ? D’étranges villes hérissées de tours de cristal ? Tu finis par te décider à aller au-devant des rêves et espoirs que ces spectacles font naître en toi. Mais l’horizon recule, il se dérobe, longtemps, gardant son mystère toujours. Tu te décourages. Peut-on tourner le dos à l’horizon ? Non. Devant toi à nouveau, le voilà, fermant ton univers, mais c’est toujours un appel entêté à le dépasser, à te dépasser. Celui qui brandit un drapeau a-t-il le regard fixé sur l’horizon ? Et la femme portant sur sa tête un lourd fardeau qui s’amenuise puis disparaît derrière un repli de terrain en semant un flocon de poussière, quel est son ailleurs ? Et le marin au cap Horn, devant l’énorme masse liquide et mouvante qui se dresse devant lui haute comme un immeuble raconte-t-il devant un public de terrien, sait-il où trouver son horizon ? Que dire de l’oasien assoiffé qui se précipite vers le lac tremblotant brusquement apparu au loin, bordé de pâles silhouettes de palmiers ?

Ce sont songes et mensonges d’un horizon implacable.

Danielle Fayet