La chance de sa vie…

Ils s’étaient donnés rendez-vous sous les sous-bois de l’Isle Adam. Ils voulaient tous fuir les grosses chaleurs et profiter du partage d’un bon repas sur l’herbe. Si cette idée conviviale convenait à tous, elle tombait mal ce jour de début de ramadan. En effet, Amira et Djibril débutaient la période du jeûne et ne voulaient pas se soustraire. En même temps rompre ce début d’intégration avec le chef de bureau et son épouse avait été écarté par Djibril qui visait le développement d’un nouveau secteur de la société. C’était la chance de sa vie et la promotion dont il rêvait depuis dix ans, se profilait.

Les hommes parlaient affaires, les femmes s’ennuyaient. Claire, femme de Paul, se divertissait en scrutant l’horizon et sa tenue de plus en plus débridée, appelait les regards envieux et appuyés. On devinait une peau laiteuse, un corps bien nourri et un appétit pour les choses de la chair. Amira s’était écartée par pudeur et avait rejoint un bras de rivière où elle tentait de se rafraîchir. Intégration oui mais pas contre sa nature et ses envies ! Son mari l’oubliait comme tous les jours depuis son arrivée en France et le coup de pied discret dans le panier de pique nique signifiait son refus de se soumettre. Djibril s’était excusé, parlant de l’éternelle maladresse de son épouse qui pour l’heure répandait les mets au bon appétit des fourmis. Le temps passait, l’oubli total de l’épouse durait. Son besoin de se rassurer sur sa présence même lointaine le fit se retourner. Son absence le cloua sur place et le désarçonna. Contrarié, il abandonna un temps la conversation animée, se demanda tout haut où était Amira et se décida à se lever et à partir à sa recherche en s’excusant auprès du couple resté assis qui semblait se désintéresser de cette disparition. Djibril savait, elle avait osé. Il ne la maîtrisait plus. Il suivit le sentier, marcha sur son voile qui gisait à terre puis découvrit ses chaussures abandonnées. Enfin, sur une pierre plate, il vit briller le collier en or porteur du. cœur serti de pierres précieuses. Sur un tapis de mousse fraîche, il reposait tel un cadavre abandonné.

Il comprit la rupture et la fuite : elle s’éloignait à tout jamais de lui et de ses terreurs sourdes.

RMQ

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