À l’aube naissante

Brume effilochée

Dénude la montagne

Contemple le pin

Sortie de la forêt, assise au pied de l’arbre, dos appuyé au tronc j’observe au loin la brume légère qui cache la montagne. Un voile translucide descend du ciel pour se perdre sur le flanc escarpé de la cime bleutée. Un courant d’air frais me caresse le visage. Les branches basses du pin frissonnent, émettant un chuintement craintif et sourd. La tête du pin se courbe légèrement puis se tend vers la montagne dont on aperçoit le sommet. Le voile se déchire, s’érafle, s’accroche à ses pieds couvrant de ses plis froissés le fond de la vallée. Le pin lui, s’étire, s’allonge et grandit. Dans une course folle il s’efforce d’atteindre le sommet du mont qui se fige là-haut entre ciel et terre, la tête dans les étoiles, les pieds dans la glaise.

Le pin n’en finit plus de croître. La montagne ne bouge pas. Splendeur enveloppée dans un voile de brume, elle observe la cime du pin qui lui chatouille les pieds. Elle le sait ; il n’y arrivera pas. L’arbre s’épuise. Avant la fin du jour il renoncera à gravir le flanc du mont sacré, histoire de babiller sous la nuée céleste, suspendu dans l’espace flottant, sans racines au milieu des étoiles au-dessus de la pointe du mont sommeillant.

Le rêve alors s’estompe dans la nébuleuse confuse de l’aube naissante.

M.Odile Jouveaux

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